Pessah est une fête juive qui compte énormément à mes yeux et je suis heureux de pouvoir partager mon expérience et mes souvenirs à propos de ce temps particulier.
Elle fait partie des trois fêtes de pèlerinage du judaïsme qui constituent la base et l’origine de nos coutumes actuelles. Pessah retrace l’histoire de l’esclavage des Hébreux en terre d’Égypte pendant 210 ans puis leur délivrance par Moïse, intermédiaire de Dieu.
Lors de cette soirée bien particulière nous nous réunissons en famille et nous lisons l’histoire de la Hagada, livre qui relate toute l’histoire de Pessah en textes ou en chansons. Nous mangeons de la salade romaine ou des endives en souvenir de la vie amère en esclavage et des matsote, des galette de pain azyme : au moment de la sortie d’Egypte, les Hébreux partirent en hâte et n’eurent pas le temps de laisser monter leur pain.
Je suis heureux de pouvoir m’exprimer à propos de mon vécu au travers de cette fête si particulière car elle a contribué à forger les souvenirs de mon passé, fait partie intégrante de mon présent et je sais que je la fêterai pour toujours.
Enfant je vivais seul avec ma mère à Paris. Nous étions « juifs traditionalistes », c’est-à-dire très peu pratiquants. Les plus beaux souvenirs que j’ai du judaïsme de mon enfance sont les moments de fête autour de la grande table accueillante de ma grand-mère d’origine tunisienne, très portée sur les us et coutumes du judaïsme sépharade. C’était une merveilleuse cuisinière et pour elle, chaque Shabbat et chaque fête avait lieu autour d’un bon repas. Pessah était le moment de l’année qu’elle attendait le plus car elle allait enfin pouvoir réunir la famille au complet. En effet, ce qui caractérise le mieux la fête de Pessah, c’est l’aspect familial. Je garde un très joyeux souvenir de ces soirées, mon oncle qui n’était pas pratiquant non plus et ne savait pas lire l’hébreu avait pour habitude de nous faire écouter une cassette audio détaillant tout le déroulement de cet instant si différent des autres. Avec du recul, c’est qu’il est interdit à Pessah comme à Shabbat, c’est notamment d’allumer la télévision ou le poste de radio. Paradoxalement, je ne peux m’empêcher de sourire en y repensant.
Puis j’ai grandi, mûri et je me suis marié avec Eva qui elle aussi vient d’une famille parisienne juive traditionnaliste. Notre judaïsme a évolué naturellement, dans la même direction et au même rythme. Aujourd’hui, nous sommes juifs pratiquants. Nous venons de fêter Pessah dans des conditions assez particulières et loin de ce que nous avions imaginé. Nous attendions cette fête avec impatience : nous devions recevoir pour la première fois chez nous à Lausanne, en même temps, ma mère, ma belle-mère et mon beau père. Nos deux enfants étaient fous de joie. Ma femme et moi avions hâte de pouvoir organiser cette tablée, à l’image de celle de ma grand-mère. Malheureusement à cause du Covid-19 nous avons vu les aéroports, les gares et les frontières se fermer et nous avons dû mettre de côté nos rêves de passer les fêtes en famille. Difficile d’expliquer cela à mon fils de 3 ans qui avait préparé des chants à l’attention de ses grands-parents.
Le Rabbin de la communauté de Lausanne et du canton de Vaud, Rav Eliezer Di Martino, nous a fait remarquer dans un de ses discours que la dernière fois que les juifs n’ont pas eu l’occasion de se réunir pour les fêtes de Pessah, c’était lors de la Shoah lorsqu’il fallait rester caché ou fuir loin des siens. Après les fêtes nous avons pu discuter avec d’autres membres de la communauté et nous en sommes quasiment tous arrivés à la même conclusion : nous avons pour la plupar t passé de très belles fêtes de Pessah. Comme quoi, ce qui reste fixe malgré les changements, c’est le lien avec ceux qui nous sont les plus chers. Nous avons pu nous ressourcer ensemble et découvrir une autre chose de bien différent du train-train quotidien.
Pour finir Pessah est une fête remplie de coutumes puisées dans notre histoire. En célébrant cette fête, nous mettons en pratique ce que nos parents et aïeux voulaient nous transmettre. À Pessah, les enfants sont mis à l’honneur, ils chantent, posent des questions et cherchent l’Afikomam, un petit bout de matsa , un pain non levé, consommé pendant Pessa'h caché sous la nappe. Les enfants sont essentiels à cette fête, c’est grâce à eux que la transmission s’effectue.
Après ce témoignage je vous souhaite à tous une bonne santé et j’espère pouvoir vous retrouver vite à travers les différentes campagnes de « Dialogue en Route ».
En cas de questions ou de remarques, merci de nous contacter à blog@enroute.ch